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Le mardi 14 novembre 2006
Conférence-Débat : La Crise du Politique en France

Conférence organisée en partenariat avec
la Société industrielle de Mulhouse,
l'Université de Haute Alsace
et le Crédit Mutuel

Zaki LAÏDI

Si l’on définit le politique comme la gestion de la vie dans la cité, cette vie étant faite de tensions, le politique est invariablement confronté à la crise. Elle lui est en quelque sorte inhérente. Si crise du politique il y a, cela ne date pas d’hier. Simplement, elle paraît plus accusée à nos yeux, principalement par manque de lisibilité.

Dévalorisation culturelle de l’avenir

Depuis deux siècles, notre représentation du monde reposait largement sur une conception de l’histoire marquée par l’idée de progrès, lequel offrait une lisibilité à l’avenir, que l’on parvenait à se figurer assez facilement. Le politique qui a pour mission d’anticiper voyait sa tâche facilitée.

Or, nous assistons aujourd’hui à une crise sans précédent du temps. On vit dans un monde de l’urgence et de l’immédiateté où notre capacité à nous projeter dans l’avenir a disparu ou se recroqueville sur le présent. Apparaît alors pour le politique un dilemme insurmontable entre la conscience des problèmes dont la résolution requiert du temps, et les attentes du citoyen qui négligent la nécessaire médiation du temps. Ce changement de rapport au temps, et la dévalorisation culturelle de l’avenir qui lui est concomitante est la première cause de la crise du politique.

L’effondrement de l’idéologie du progrès

L’idéologie du progrès qui servait de matrice à l’action politique est devenue inopérante dans ce contexte.

On peut trouver trois raisons majeures à cet effondrement de l’idéologie du progrès sur laquelle s’appuyait le politique. C’est d’abord, la prise de conscience de la complexité du monde par un nombre croissants d’acteurs sociaux. Du fait de l’élévation générale du niveau d’éducation, la complexité du monde apparaît manifeste à beaucoup, et rend dubitatif sur une idéologie du progrès proposant une clé d’interprétation trop simple. Ensuite, on est devenu plus attentif à l’ambivalence du progrès. On est beaucoup plus sensible aujourd’hui aux effets négatifs sur l’environnement d’un certain nombre d’avancées technologiques qu’on ne pouvait l’être dans une société qui ne jurait que par le progrès que constituait l’avènement de la civilisation automobile… Les effets positifs du progrès sont à mettre en balance avec ses effets négatifs. Enfin, la croyance dans le politique s’est affaiblie, particulièrement dans le cas français, en raison d’une histoire politique qui s’est faite en référence à l’Etat, lequel a été déifié à mesure que la société se laïcisait. Le politique s’identifiait à l’Etat, lequel a pris une place considérable dans le cas français. Or, l’Etat s’effaçant, on a en France plus qu’ailleurs, l’impression que la politique disparaît.

Le politique n’est plus tout mais le politique est dans tout

Il en résulte une prise de conscience que le politique n’est plus tout, mais que le politique est dans tout. Le politique n’est plus tout, et surtout il n’est plus seulement l’Etat ; la mondialisation vient le rappeler, elle qui met en évidence la distorsion entre le système de légitimation politique qui reste national et étatique, et les instances décisionnelles qui, elles, sont de plus en plus internationales. Le vote, qui légitime les instances nationales, apparaît ainsi comme étant de moins en moins à même de peser sur les décisions prises à un niveau international. Mais simultanément, grandit la conscience que le politique est dans tout. Il ne se réduit plus à l’Etat, le politique peut alors investir d’autres champs d’activité, notamment au niveau local où la demande politique des citoyens est très forte.

Revalorisation des corps intermédiaires et mondialisation assumée

Dans ce contexte comment avancer et permettre au politique de surmonter cette crise ? Zaki Laïdi propose deux voies.

La première part du constat qu’en France nous souffrons d’une faiblesse des corps intermédiaires. Or, la démocratie a besoin de médiations. Elles peuvent ne pas être la panacée, elles n’en sont pas moins indispensables au bon fonctionnement du politique. C’est la non-prise en compte des corps intermédiaires (syndicats, entreprises, associations…) qui expliquent les aberrations dans la gestion, -quoi qu’il en soit de leur légitimité sur le fond- des 35 h ou du CPE… La redécouverte des médiations (autonomie des universités, décentralisation, etc…) est un passage obligé à la solution de la crise du politique.

La seconde voie dessinée par le conférencier est d’assumer sereinement la mondialisation. Celle-ci apparaît comme globalement positive. Le monde est globalement plus riche qu’il ne l’était avant le développement de ce phénomène dont nous ne sommes encore qu’aux débuts. Nos difficultés économiques ne sont pas d’abord liées à la mondialisation. On ne saurait expliquer par exemple la persistance d’un taux de chômage important en France par ce phénomène. En effet, de tous le pays de l’OCDE, la France est le pays le moins dépendant pour ses importations des pays à bas salaires. Ces importations ne représentaient que 17% des importations françaises, contre 32% aux Etats-Unis, et 37% au Japon. Or, ces deux pays ne rencontrent pas un taux de chômage aussi important. Cela signifie que même au niveau local, ces difficultés sont gérables. Si localement, il peut être difficile de s’adapter, et les coûts d’adaptation très réels, le local est un champ où le politique peut s’investir et agir efficacement. Le champ local a été sans doute sous-investi par le politique du fait d’un Etat qui s’identifiait au politique, il gagnerait à être réinvesti pour le plus grand profit du politique, et des citoyens.

Synthèse :
Hervé PARADIS-MURAT, CPH
Association Centre Porte Haute
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